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Seuls les anges ont des ailes


De Impétueux, le 21 octobre 2017 à 19:03
Note du film : 3/6

Encore un film qui surfe sur la vague déterminée qui fait du vampire un pauvre bougre méritant et même quelquefois héroïque, frappé par une sombre fatalité et réduit à semer la mort autour d'elle en le regrettant et non plus, comme dans l'acception classique comme l'incarnation du Mal, la créature de l'Enfer. De quand date-t-on cela ? Je ne suis plus l'expert en vampirologie que j'étais il y a cinquante ans, mais je me demande si on ne peut pas fixer à la Chronique des vampires créée par Anne Rice en 1976 cet affadissement du mythe, chronique dont a été tirée l'excellent Entretien avec un vampire de Neil Jordan en 1994. Et aussi, en 1992, le Dracula de Francis Coppola, qui montrait un personnage torturé, maléfique endurant une affreuse malédiction. Malgré de réelles qualités esthétiques ces films-là sont moins intellectuellement séduisants que ceux qui montrent d'absolus suppôts de Satan, tellement, à mes yeux, il n'est bon film de méchant qui ne noircisse le tableau (plus le tableau est noir, plus il expose la question fondamentale du Mal).

Toujours est-il, que, dans le veine romantique et compassionnelle, Dracula Untold n'est pas désagréable à regarder, si l'on supporte les travers – il est vrai souvent exaspérants – du cinéma pour adolescents d'aujourd'hui, c'est-à-dire le recours constant aux images numériques, le montage frénétique, la brutalité des zooms, la violence démonstrative, les gros plans féroces sur des visages décomposés, les dialogues infantiles. Il faut reconnaître, déjà, au film de Gary Shore un mérite historique : celui de montrer l'oppression que l'Empire ottoman a fait subir à l'Europe orientale durant des siècles. Dût être choquée Mme Taubira, qui ne voulait considérer l'esclavage que dans son horreur occidentale, il est bien certain que les Turcs ont longuement asservi des populations, arraché des jeunes gens à leurs familles pour les fanatiser (ce sont les fameux janissaires), alimenté un commerce de chair qui, d'ailleurs, continue à prospérer dans tout le Proche Orient.

Donc le Prince Vlad de Valachie (Luke Evans) qui a passé son enfance comme esclave de la Sublime Porte, devenu tributaire (tributaire au sens propre, c'est-à-dire devant un tribut) gouverne paisiblement son peuple vassal, aimant sa femme Mirena (Sarah Gadon) et son fils Ingeras (Art Parkinson). Mais le sultan Mehmet II (Dominic Cooper), qui fut son ami, alors qu'ils étaient l'un et l'autre enfants dans le sérail, exige pour alimenter son armée, que lui soient livrés mille jeunes gens, dont Ingeras. Vlad se révolte et, dans une sorte de pacte faustien, fait alliance avec les vampires, créatures immondes assoiffées de sang et condamnés à une longue géhenne, qui lui conféreront force et invincibilité. Toutefois, si Vlad parvient résister trois jours à l'affreuse envie de sang frais qui lui a été communiquée, il vaincra le charme ; sinon il demeurera démon de l'ombre.

On devine la suite. Vlad fait tout ce qu'il peut et les deux premiers jours, paraît tenir assez bien la gageure, anéantissant (ou à peu près) les armées turques… Mais…

Et c'est ainsi que le Prince Vlad, Vlad l'empaleur comme le narre la légende (mais – ô vertu étasunienne, l'empalement ne consiste pas à percer le thorax ou l'abdomen des ennemis vaincus, mais bien à… voir Cannibal holocaust si on s'intéresse aux détails), c'est ainsi que Vlad devient Dracula – le dragon – et que la tradition se perpétue.

Le récit n'est pas mal construit, les images sont spectaculaires ; mais ceci est aujourd'hui le minimum que l'on attend d'un film de genre ; le réalisateur s'est beaucoup inspiré, peut-on penser, des armées millionnaires mises en scène par Peter Jackson dans sa Trilogie et on a l'impression de se retrouver à la bataille du gouffre de Helm dans Les deux tours lorsque déferlent, dans des vallées sévères des kyrielles de combattants. Mettons aussi au crédit de Gary Shore l'utilisation qu'il fait des chauves-souris dont des myriades numériques gouvernées par Vlad envahissent l'espace de façon spectaculaire.

La dernière séquence qui bascule le film de nos jours est inutile et même un peu bébête. Mais j'ai connu pire…


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