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Une vision élaborée de l'univers


De vincentp, le 2 janvier 2018 à 23:39
Note du film : Chef-d'Oeuvre


El Dorado réalisé en 1966 par Howard Hawks sur un scénario de Leigh Brackett développe les thèmes typiques du cinéaste, à commencer par un éloge appuyé du professionnalisme. Ce concept est incarné par les deux médecins (celui de famille, et le jeune spécialiste, mieux formé et plus compétent en matière de chirurgie, amené à remplacer en mieux le premier), le tueur (Christopher George) et son alter ego (John Wayne). Ces professionnels produisent un diagnostic rigoureusement exact de la situation du moment présent, et échafaudent des plans pour l'avenir. Ils connaissent leurs limites personnelles, ne s'exposent pas individuellement et inutilement. Face à la meute de mercenaires appuyant Edward Asner, Wayne opère une prudente retraite en faisant reculer son cheval de façon spectaculaire. Ces professionnels s'appuient sur les compétences des anciens (incarnées par Arthur Hunnicutt) et produisent de nouvelles compétences (la formation aux armes de James Caan).

Moteurs du professionnalisme : l'amitié (Robert Mitchum), qui permet de bâtir un projet collectif. Les sentiments voués à des jeunes femmes aux formes généreuses qui permettent de franchir les obstacles. Selon Hawks, le professionnel doit être au service d'une cause juste, le respect de la propriété d'autrui dans des limites raisonnables, le respect de l'intégrité physique et morale des individus. Il doit s'appuyer sur les anonymes de la cité, telle la mexicaine guidant James Caan et représentant le volet intégration des Etats-Unis. Tout ceci ne serait que vain discours sans une forme de qualité exceptionnelle, produisant un spectacle qui va crescendo. Peu de scènes spectaculaires, simplement une succession de séquences parfaitement construites, avec un suivi très précis de la transformation psychologique des individus, associée à leurs actions du quotidien (comme une simple patrouille en duo dans les ruelles de El Dorado).


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De Impétueux, le 23 septembre 2017 à 15:50
Note du film : 3/6

Je lis ici et là que El Dorado est plus qu'un remake, une variation sur le même thème que Rio Bravo. De fait on y retrouve les mêmes histoires de vendettas boueuses et bouseuses et les mêmes personnages taillés à la serpe, sans complexité ni ambiguïtés, chevaleresques à qui mieux mieux, comme dans des chansons de geste. Fallait-il que le Nouveau Monde, quand il créait ses légendes et construisait son identité passât par les mêmes ennuyeuses litanies sommaires ? C'est possible.

En tout cas El Dorado passe un peu mieux l'écran que son film prédécesseur et inspirateur, grâce à l'insertion, ici et là, de quelques paysages photogéniques (mais au début ; ensuite, comme dans Rio Bravo on est confiné dans les trois ou quatre ruelles du patelin), à une intrigue un peu plus étoffée, à quelques propos qui ne manquent pas d'humour (Mitchum qui tente de se décrasser au milieu du tohu-bohu : La prochaine fois que je voudrai prendre un bain tranquille, j'irai dans un hall de gare !) et à la beauté des deux personnages féminins, Maud (Charlene Holt), la fille galante du coin et Joey (Michele Carey), l'intrépide fermière.

Et puis il y a désormais un peu plus de sauvagerie – c'est-à-dire de réalisme – dans le cours du récit ; déjà, par exemple, le meurtre malencontreux, presque accidentel du jeune Luke McDonald (Johnny Crawford) par l'honnête, loyal, valeureux, mercenaire Cole Thornton (John Wayne) ; puis l'excellente idée de la balle tirée par Joey, la sœur du pauvre Luke, en vengeance, balle qui s'est logée à deux doigts de la colonne vertébrale et paralyse périodiquement et inopinément le solide tueur à gages. Assez jolie idée cruelle aussi cette scène où le même Thornton pousse deux acolytes de son ennemi et concurrent Nelse McLeod (Christopher George) vers une mort certaine en leur tirant dessus et en les faisant sortir les premiers vers la porte où il est lui-même guetté. Je ne dis rien du massacre final, véritable bouillie humaine dont on ne parvient pas à compter les cadavres. On sent que bientôt le western italien avec les mentons mal rasés, la crasse, la puanteur et le sadisme de ses protagonistes va ringardiser pour un bon moment son aîné étasunien.

En revanche apparaissent comme des ponts-aux-ânes presque obligés à la fois l'abrutissement alcoolique du shérif Jimmy Harrah (Robert Mitchum) – naturellement finalement rédimé -, les gagateries ronchonnes de son vieil adjoint, Bugle (Arthur Hunnicutt) et les trépidations juvéniles du blanc-bec Mississippi (James Caan). Tout cela est d'un classicisme éprouvé et finalement assez lassant. J'ai d'ailleurs l'impression – comme souvent, il est vrai – que Howard Hawks a tiré sans scrupule à la ligne dans un film qui dépasse tout de même les deux heures pour un sujet bien mince, moins guindé toutefois que Rio Bravo. Ainsi cette interminable séquence nocturne de bataille, heureusement un peu égayée par le tintement des cloches de l'église qui résonnent sous les balles.

N'empêche que lorsque je songerai à Hawks je retournerai bien davantage vers ses films d'Afrique, La terre des pharaons et surtout Hatari ! : la vieille terre originelle me semble correspondre beaucoup mieux à son intelligente complexité.


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