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"Grand film malade" ?


De Steve Mcqueen, le 9 juillet 2014 à 21:24
Note du film : 6/6

En ce qui concerne Heaven's Gate, je viens de terminer sa vision il y a 20 minutes et j'en ai encore les larmes aux yeux. Ayant également il y a peu revu Voyage au bout de l'Enfer, je considère Michael Cimino comme l'un des plus grands cinéastes du siècle, toutes nationalités confondues, et sur la foi de ces deux seuls films ( je précise que je suis loin d'avoir vu tous les films de la galaxie, mais un certain nombre quand même). Je rejoins en ce point Samuel Douhaire de Libération, que je me permets de citer : "Heaven's gate est l'une de sept merveilles du monde cinématographique".

 

J'estime en outre que c'est le dernier grand cinéaste mégalomane, capable d'engloutir un budget faramineux, de dépasser largement le temps de tournage imparti, et d'emmerder profondément les producteurs frileux. J'aime également sa conception, qui peut sembler paradoxale, selon laquelle le cinéaste n'est qu'un nom qui doit s'effacer derrière l’œuvre. Enfin, je considère l'amputation de près d'une heure de son film lors de sa sortie en 1981 comme l'un des plus gros scandale de l'Histoire du cinéma. Je suis ravi qu'il ait coulé la United Artist et toutes ces producteurs ricains qui prétendent imposer à un cinéaste leur vision d'une œuvre qui ne leur appartient en aucun cas. La conception du cinéma de certains producteurs états-uniens qui se prostituent au nom de la soi-disant bonne réception du film par le public me fait vomir, de même que le système des projections test émasculant certains films (Abyss de James Cameron par exemple)

Au risque de vous paraître virulent, la réception du film dans sa version intégrale par le public américain (source IMDb) prouve la fatuité atavique d'une partie de ce public. Je suis ravi que les critiques françaises, que je ne portent pas dans mon cœur de façon générale, rétablissent la balance, de même que le public français. Le film présente une facette peu glorieuse de l'histoire états-unienne, montrant comment le gouvernement appuie et aide les éleveurs à éradiquer purement et simplement une partie des immigrants européens. Cette page peu reluisante de l'histoire américaine est effectivement loin de l'image amidonnée du pays de l'Oncle Sam, pays "démocrate" et défendant la "liberté" sous toutes ses formes ( un pays où au passage, les armes sont dans certains états en vente libre, sur la foi d'une constitution datant de… 1787 ! – ayant quand même été modifiée par 27 amendements..)

Je précise également que, mon point de vue étant radicalement opposé à certains énoncés sur le forum, je respecte néanmoins vos opinion, notamment celle d'Impétueux, dont je partage au passage l'avis sur la "nudité" d' Isabelle Huppert !

Le film est empreint d'un souffle épique à nul autre pareil. le lyrisme qui s'en dégage me laisse sur les rotules. La première apparition de Christopher Walken à travers l'impact d'une balle laissée sur un drap blanc me laisse sans voix. La façon dont Cimino utilise l'inexpressif Kris Kristofferson (dans son meilleur rôle avec Pat Garrett et Billy le kid de Peckinpah) prouve son génie. Génie qui éclabousse chaque seconde de ces 3 heures et 34 minutes de projection ; j'en veux pour preuve la séquence de la valse inaugurale, qui trouve un écho dans la séquence des patins à roulette ; le traitement de la violence, qui gicle comme on crève un abcès ( voir la mort des des violeurs d'Isabelle Huppert); la façon dont Cimino filme la mort de Christopher Walken renvoie Sam Peckinpah au rang de petit garnement mal élevé (bien que j'admire ce dernier).

Le final est sublime d'irrésolution, d'amertume, d'ambiguïté. Je tiens la césure entre la mort d'Isabelle Huppert et le plan sur le bateau, sans aucune transition autre qu'un carton indicatif, comme étant aussi efficace que le passage de la Pennsylvanie au Vietnam dans Voyage au bout de l'Enfer. La façon dont Cimino dilate le temps dans certaines séquences, sans jamais faire poindre la moindre ébauche d'ennui est remarquable.

Enfin c'est de tous les cinéastes que je connais celui qui filme le mieux les rites, les moments solennels empreints de gravité ( la roulette russe, le mariage et le repas final de Voyage au bout de l'enfer ; la valse et la séquence des patins à roulette dans Heaven's Gate ; le repas au cours duquel est exhibé la tête coupée dans L'année du dragon ; l'assassinat sur la place du village dans Le sicilien).

Je précise que je tiens Thunderbolt and Lightfoot (Le canardeur en vf), son premier film, pour un excellent road-movie initiatique au titre français stupide et racoleur, l'Année du dragon pour un bon polar sans plus, Le Sicilien pour un ratage fascinant , Desperate hours pour un navet. Je n'ai pas vu Sunchaser, son dernier film, qui date de …1996 !

L'importance de Cimino dans le cinéma mondial est considérée comme évidente en France; la façon dont il est traité au pays des "bouffeurs de pop-corn" me laisse coi.

Il s'agit tout simplement, je le répète, d'un génie incompris sacrifié sur l'Autel d'une industrie cinématographique impitoyable, ayant eu un mal fou à monter ses films suivants suite à cet échec grandiose. Je considère que la coupe d'une heure par les producteurs en 1981 est une émasculation de l'oeuvre, ayant vu également la version tronquée qui présentait néanmoins des restes sublimes. La découverte il y a un an de la version intégrale lors de sa ressortie sur grand écran a eu sur moi l'effet d'un choc comme j'en ai rarement eu dans ma vie d'amateur de cinéma. Cela est appréciable à l'heure où pour qu'un film "marche" au box-office, il doive souvent comporter : soit des effets spéciaux racoleurs, soit une 3D inutile, soit un humour bas de plafond, soit une violence gratuite, soit une star "bankable" (cela peut être contesté). Je ne pense pas me tromper en affirmant qu'une partie des spectateurs se fiche éperdument du nom du réalisateur derrière le film qu'ils visionnent en bouffant du pop-corn immonde et hors de prix.

Cette chronique étant volontairement virulente, je comprendrais aisément que la rédaction du site en modère certains passages (de préférence sans altérer mon point de vue). Je vous remercie par avance d'avoir pris le temps de me lire.


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De Commissaire Juve, le 19 février 2014 à 12:27
Note du film : 3/6

Je vois que j'ai mis 3… C'était pour dire que j'avais trouvé ça "moyen". Même si, effectivement, j'ai pensé à plusieurs reprises que c'était une "purge". Et j'avoue avoir eu recours à l'avance rapide dès le prologue (et pendant la scène de bagarre… l'interminable tourniquet à la Luky Luke). J'ai mis 3 pour quelques beaux paysages, pour la scène des patins à roulettes. Mais c'est effectivement un grand film "malade".


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