C'est le premier long-métrage réalisé par Eisenstein en 1925. Succession de plans courts, débités à toute vitesse, suivant la masse des ouvriers dans une grève insurrectionnelle à faire pâlir d'envie le mouvement "nuit debout". Des ouvriers s'opposent en 1912 au pouvoir tsariste, présenté sous un mauvais jour. Le fond s'inscrit bien évidemment dans une orthodoxie marxiste-léniniste et constitue un témoignage d'un courant de pensée révolu. La forme est de grande qualité : la variété des plans, l'intensité dramatique qui émane de chacun d'eux frappent le spectateur contemporain.

Le cinéaste soviétique aurait été influencé à ses débuts par Griffith. Eisenstein et ses collaborateurs ajoutent leurs touches personnelles avec des séquences qui évoquent plutôt L'homme à la caméra (1929) de Vertov. La superposition des visages d'animaux et d'individus dans La grève est stupéfiante d'audace et de créativité. Il est clair que Eisenstein était avant tout un artiste, et que le marxisme passait chez lui au second plan (lui donnant les moyens d'exprimer sa créativité). Ce langage cinématographique de 1925, très novateur pour l'époque, reste moderne aujourd'hui.

Nb : la bande-son (Shostakovitch) qui accompagne ce film muet est tout simplement parfaite.