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L'adolescence éternelle


De verdun, le 19 septembre 2021 à 15:08
Note du film : 5/6

France, années 1960. Un petit gangster minable, ex-coureur automobile, François Holin dit Ho (Jean-Paul Belmondo), va se venger des humiliations subies lors de ses premières exactions en devenant l'ennemi public numéro un. Mais poussé par un souci de vérité, Ho va se faire connaitre auprés de la presse qui a fabriqué sa gloire: ce sera le début de sa chute…

Malgré le fait qu'il ait attiré plus de un millions et demi de spectateurs à sa sortie en salles en 1968, Ho ! n'a pas marqué l'histoire du cinéma français, c'est le moins qu'on puisse dire. La preuve en est que les médias n'ont guère évoqué ce film lors de la disparition récente du grand Belmondo

Dans ces conditions, je m'attendais donc à voir un film médiocre. Or, je dois reconnaître que j'ai éprouvé beaucoup de plaisir à redécouvrir ce film négligé. Ma chronique sera encore plus élogieuse que celle déjà positive de Impétueux.

Certes, on peut être agacé par certaines incongruités dont Impétueux a fait précédemment l'inventaire, notamment la mort accidentelle du caïd Canter (Sidney Chaplin) ou le traquenard final mais il me semble qu'elles sont inhérentes à l'univers de José Giovanni. Ces "idioties" se retrouvent en effet dans Dernier domicile connu ou La scoumoune. Certes, le rythme est des plus chaotiques mais il me semble plus satisfaisant que celui du si célébré Les aventuriers, précédent fait d'armes du tandem Robert Enrico-José Giovanni.

Malgré ces scories, Ho ! est un film passionnant car singulier. Les auteurs ont le mérite d'avoir tenté -et réussi de mon point de vue- le mélange si périlleux entre le film noir et des éléments plus légers. C'est un film qui émane une ambiance particulière grâce au Paris de la fin des années 1960, à la partition de François De Roubaix qui propose aussi bien un thème principal mélancolique que des airs de charleston contribuant à l'étrangeté de l'ensemble, et grâce à la photo aux dominantes ocres de Jean Boffety.

Certains éléments du scénario sont d'une indéniable modernité. Ainsi, la séquence en prison, me semble d'un réalisme peu vu dans le cinéma français de l'époque. Par ailleurs, le personnage de François Holin annonce de façon troublante les malfrats les plus fameux de la décennie suivante: un Spaggiari, avide de reconnaissance, et un Mesrine, soucieux de "corriger" les inexactitudes proférées par les journalistes.

Et puis Ho ! doit bien évidemment beaucoup à la prestation de Jean-Paul Belmondo qui joue ici une petite frappe insignifiante obsédée par la gloire qui n'aura même la fin tragique dont il rêvait… C'est donc un contre-emploi par rapport aux futurs rôles de "supermen" auquel Belmondo habituera son public dix ans plus tard. C'est l'occasion de constater une fois de plus à quel point l'acteur était à son meilleur dans les années 1960, époque où il pouvait tout jouer. Il faut dire qu'il osait alors choisir des rôles très éloignés de son image de marque tels que Le voleur, Léon Morin prêtre ou La sirène du Mississipi. Le Belmondo de Ho ! est d'une grande justesse: il suffit de comparer sa prestation en clochard ici avec celle du professionnel treize ans plus tard pour s'en apercevoir. Inutile de préciser que le Bébel Ho ! est entouré par une pléiade d'excellent seconds rôles: Paul Crauchet, Alain Mottet, Raymond Bussières, André Weber, Jackie Sardou sans oublier la trop rare Joanna Shimkus.

En somme, Ho ! est de mon point de vue une belle surprise. Un film à redécouvrir absolument, notamment pour ceux, et ils sont nombreux, qui admirent Jean-Paul Belmondo. Un film trop souvent pris… de haut !


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De Impétueux, le 16 juillet 2014 à 12:49
Note du film : 4/6

Tout de même, le cinéma de Robert Enrico est assez particulier, maladroit, mais très attachant, comportant des balourdises souvent risibles, des dialogues mal fichus, des tas d'invraisemblances et de naïvetés, mais finissant toujours par intéresser et à retenir l'attention. Il me semble que Ho ! est plein de ces caractéristiques, agace et irrite plutôt au début mais laisse in fine une impression agréable, qui n'est pas seulement due au talent et aux thèmes musicaux de François de Roubaix.

Donc des tas d'idioties crispantes : l'accident automobile du pré-générique (effet spécial risible et je ne suis pourtant pas très exigeant là-dessus) ; le manège des frères Schwartz (Tony Taffin et Stéphane Fey) lors de la répartition du butin, la main droite continuellement dans la poche poitrine de leur veston, c'est-à-dire sur leur calibre ; la mort accidentelle du gangster Canter (Sydney Chaplin), tué par la chute sur le trottoir de son revolver ; la rupture théâtrale de Bénédicte (Joanna Shimkus) avec François Holin, dit Ho (Jean-Paul Belmondo) ; et le traquenard qui permet de presque interpeller François, collectionneur assidu, qui a lu dans le journal que vient d'être édité par un grand faiseur une cravate en fibre de coco !

Rien que ça et c'est déjà beaucoup ; le film n'est pas non plus très équilibré, très bien rythmé ; l'épisode de la prison, où Ho se transforme graduellement en sosie d'un clochard compagnon de cellule qui doit être rapidement relâché, est réussi, mais tout de même bien long et un peu tiré par les cheveux. Cela dit, la description de la cellule, de sa crasse, de sa promiscuité (le détenu qui se lève la nuit et dérange tout le monde pour aller pisser), de la violence des prisonniers, de l'arrogance des matons me semble très réussie.

Ce qui va déjà mieux, c'est le filmage du monde et du Paris de 1968; une époque où il y avait des contre-allées sur les Champs-Élysées, des billets de 100 F. à l'effigie de Pierre Corneille (et où, d'ailleurs, on allait chercher ces billets au guichet des banques), où on pouvait laisser le moteur tourner quand on allait acheter des cigarettes (et on avait bien tort, puisque des voleurs en profitaient ; mais enfin, on avait encore confiance) ; le temps où on se tuait encore en disputant une course automobile (et, dût mon propos choquer, je trouve que la Formule 1 a perdu beaucoup de son intérêt depuis lors) ; le temps où on pouvait lire le très médiocre quotidien Paris-Jour (et un paquet d'autres, France-soir, L'Aurore, Combat…) ; le temps où l'on était tout fier d'avoir, sur sa voiture, une antenne radio rétractable qu'on faisait monter et descendre grâce à un bouton situé sur le tableau de bord…

Et tant qu'on y est, d'ailleurs, ce goût, cette fascination de ce qu'on appelait le gadget, qu'on trouvait aussi bien dans les Drugstores (le présentoir à cravates rotatif électrique dont use Ho, l'énorme briquet Zippo) que chez soi (l'appartement de Bénédicte, son fauteuil coque qui pivote et qui, pivotant donc, vous jette sur un lit recouvert de fausse fourrure… il faudrait d'ailleurs que soit réédité Modesty Blaise de Joseph Losey avec Monica Vitti qui est, il me semble, très typique de ces années-gadget).

Mais, ces babioles dites, le meilleur de Ho ! est, il me semble dans le rôle à contre-emploi de Jean-Paul Belmondo et dans l'intelligente orientation du récit vers un personnage assez falot, immature, soumis qui, par la suite d'un concours de circonstance et d'une suite de hasards heureux se voit placé dans un rôle dont il rêvait, celui d'un truand important, présenté par la Presse comme un individu dangereux et qui connaîtra son heure de gloire lors de son arrestation par des forces de police considérables, ses ennemis, les Schwartz, et sa maîtresse tous morts, ce qui ajoute une voluptueuse touche tragique à la légende qu'il se forge ainsi… N'être pas pris au sérieux par les vrais bandits et finir sur un tel pavois, quelle merveille !


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