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Le phénomène Tarantino


De Impétueux, le 5 mars 2019 à 15:24
Note du film : 4/6

Comme, grâce à Reservoir dogs et Django unchained je suis, depuis quelques années, un peu revenu de mes préventions contre Quentin Tarantino, sans jamais le placer, bien sûr, au sommet de mon Panthéon cinématographique, je me suis dit qu'il pouvait être instructif d'aller redécouvrir les deux Kill Bill. J'avais, il y a beau temps, regardé assez distraitement le premier, vite agacé par une violence si chorégraphiée que, malgré sa sauvagerie, elle n'est absolument pas terrifiante et que son esthétisme athlétique la fait volontairement décoller de toute réalité. Je ne suis pas, pas du tout allergique aux massacres, que ce soit ceux de Cannibal holocaust ou ceux d'Hostel, mais, dans le genre, j'estime que le minimum est de filer les chocottes au spectateur. Ce qui n'est pas le cas dans le film de Tarantino, tout au moins dans Kill Bill volume 1.

Ce n'est pas le cas parce que j'ai découvert à la vision que le double film avait d'autres charmes. Certes les histoires d'élimination successive d'un coupable ne sont pas rares au cinéma. J'ai en tête, par exemple la très singulière Journée bien remplie de Jean-Louis Trintignant. Et la vengeance perpétrée par une femme de qui on a tué le mari est précisément le thème de La mariée était en noir de François Truffaut. Mais l'originalité du réalisateur étasunien, le caractère étrange, ambigu, séduisant de son film est de placer les femmes au centre de son propos.

Et cela sans pour autant le tirer vers le féminisme, loin de là. Car si la plus belle partie de l'Humanité (aux sens propre et figuré) rayonne absolument et fait admirer à la fois son agilité, sa force, sa résistance, sa détermination et son absolue cruauté, il me semble qu'on pourrait, saisi par l'empathie pour La Mariée (Uma Thurman), oublier qu'elle a fait partie d'une très prospère P.M.E. du crime international. Ce qui, au demeurant, n'a pas paru particulièrement poser de préoccupations éthiques. Pas davantage en tout cas qu'aux quatre chouettes copines qu'elle zigouillera successivement : Vernita Green (Vivica A. Fox), O'Ren Ishi (Lucy Liu), Sofie Fatale (Julie Dreyfus), Elle Driver (Daryl Hannah). Au fait, à côté de ces amazones est bien piètre et bien crétin, quoiqu'aussi cruel, le lourdingue Budd (Michael Madsen), le frère de Bill (David Carradine).

Et, au fait, Bill est la grande affaire et le manipulateur, le démiurge majuscule ! Le titre même du film le dit avec éclat ; mais il y a bien davantage : l'extraordinaire emprise qu'il exerce sur toutes les filles de son entreprise, qui sont aussi, la chose est implicite mais évidente, les houris soumises de son harem. Il n'est que de voir de quel ton déférent elles lui parlent, combien elles lui obéissent, à quoi elles sont prêtes pour le satisfaire. Une des images qui m'ont marqué dans le film – assez rares, au demeurant, hors les chocs visuels de violence – une des images fortes et glaçantes est celle où, à la fin du volume 1, Sofie Fatale (Julie Dreyfus), démembrée par La mariée (Emma Thurman) pour obtenir des renseignements, demande pardon à Bill de ne pas l'avoir mieux servi et d'avoir, sans doute, craqué. Adulation, fascination pour un homme supérieur et reconnu comme tel par ses servantes. Dans un mode ricaneur, je songeais à la relation de totale subordination qu'exerce Derek Flint (James Coburn) dans deux excellents films parodiques (Notre homme Flint de Daniel Mann, F comme Flint de Gordon Douglas).

Le film est bâti en chapitres et en faisant virevolter les temps du récit ; reconnaissons, comme de coutume à Tarantino une grande maîtrise de ces constructions compliquées, où l'on va, l'on vient, où l'on quitte les uns dans un moment décisif pour se consacrer aux autres dans un instant de tension. Je crains qu'on puisse seulement dire que le réalisateur s'amuse et se goberge beaucoup de sa virtuosité, qui n'est pas toujours justifiée : l'idée de passer en dessins animés l'histoire de la vie périlleuse de O'Ren Shi (Lucy Liu) est ainsi particulièrement ennuyeuse. Et la bien trop longue séquence de massacre qui suit, malgré l'inventivité des chorégraphes, est à la limite du supportable.

C'est bien dommage quand on a les talents et les moyens de Tarantino de s'amuser comme un gosse avec ses jouets. Mais ça se laisse voir, si l'on est un peu indulgent.


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De lych666, le 4 décembre 2006 à 13:25
Note du film : 5/6

Je n'arrive pas à définir ce qui me fascine tant chez Tarantino, je ne connais pas toutes ses références et allusions à ses lubies et pourtant je ne peux m'empêcher de jubiler devant tous ses films. Kill Bill n'est pas mon préféré, je garde une préférence certaine pour les fameux Jackie Brown et Pulp Fiction, mais de la à dire qu'il est vide et sans création, ouch! C'est un peu fort… Parfois, j'ai l'impression que Tarantino a filmé des détails spécialement pour moi, des petits trucs insignifiants, mais que j'adore revoir, par exemple dans Kill Bill Vol 1:

  • Pendant la première bagarre entre Black Mamba et Vipère cuivrée, la chaussure de cette dernière brosse les bouts de verres sur le sol du salon dans une posture très menaçante. D'ailleurs tout le passage dans la cuisine où les deux tueuses parlent jusqu'à cette scène d'action géniale au rythme irréprochable: "Cuivrée tire à travers le paquet de céréales, rate son coup, mamba laisse tomber sa tasse au ralenti, shoot dedans avec son pied, cuivrée l'évite, mais n'évite pas le couteau que vient de lancer Mamba"… Tout ça en cinq secondes…Une scène qui n'a rien à envier à la première scène d'action dans le bar de L'Impasse de De Palma… Et Mamba marche en plongée sur les céréales qui craquent sous ses pieds, retire son couteau de la poitrine de Cuivrée, l'essuie et le remet dans son fourreau avec une minutie très élégante…
  • Tarantino arrive à rendre le sabre Hattori Hanzo des plus précieux avec moult petits détails tels que le son de la lame, la façon avec respect et soin dont Uma Thurman le prend, le regarde, Dont les personnages en parlent et font de lui un personnage aussi important…
  • La manière dont Hattori Hanzo replace son couteau de cuisinier entre les deux planches de bois.

Dans le Vol 2:

  • L'oeil d'Elle Driver qui remonte entre les orteils de Mamba, on le sentirai limite sous notre pied…
  • Les pieds de Mamba fusant en caméra subjective dans Budd qui lui tire dans la poitrine avec du gros sel (encore une scène d'action de quelques secondes très impressionnante).
  • Bill qui prépare les sandwichs en prenant soin d'enlever la croute du pain de mie..

Bref, je ne peux pas non plus reprendre le film (les 2) plan par plan, et pourtant c'est ce qu'il faudrait faire pour vous transmettre toutes les qualités de réalisateur de Tarantino… J'ai d'ailleurs essayé d'écrire une chronique sur Pulp Fiction, mais ça serait bien trop long et indigeste car le film se suffit à lui même… Je ne peux pas vraiment parler de Kill Bill de manière exhaustive non plus car cela me prendrait au moins une vingtaine de pages… Il faudrait aussi parler de l'esthétique, des dialogues,des personnages, de la narration, du rythme, de la musique, l'alliance de tout ça (et moi, je ne parle que des détails insignifiants, sans tous les citer et seulement ceux qui me viennent maintenant à l'esprit, car il y en a beaucoup d'autres et non les moindres, bref, ce message est très frustrant)… Et oui, le style de Tarantino à mon goût n'est pas un Gloubi Boulga ou ragoût sans sauce comme Le pacte des loups par exemple, mais un pur exercice de style passionné et créateur de nouvelles émotions… Je pourrais voir et revoir ses films sans me lasser, ce qui n'est pas le cas de certains films que je considère pourtant meilleurs…


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le matrix de tarantino


De Impétueux, le 10 juin 2005 à 12:46
Note du film : 4/6

Halte au feu ! Mes convictions politiques, religieuses ou philosophiques n'entrent pour rien dans l'indifférence que j'ai éprouvée pour Tarantino dès Reservoir dogs ! J'admets volontiers qu'était purement polémique ma rogne contre la Palme d'Or de 1994 ; d'abord parce que ce genre de récompenses n'a absolument aucune importance, puis parce que Tarantino n'a sûrement pas conspiré pour l'obtenir et ne pouvait pas la refuser ; je bats donc ma coulpe là-dessus, mais mon pseudonyme me semble dire assez que je suis plutôt un réactif et un bouillant (après tout ! "Dieu vomit les tièdes", dit l'Ecclesiaste).

Cela posé, ce qui m'ennuie chez Tarantino, c'est avant tout l'usage d'une violence gratuite et esthétisée, qui en fin de compte, me laisse parfaitement indifférent au sort des protagonistes.

C'est d'ailleurs davantage gratuite qu'esthétisée que je fustige ; quand Kubrick filme une des scènes premières d'Orange mécanique sur accompagnement musical de La pie voleuse de Rossini, dans une sorte d'étrange ballet entre la bande d'Alex et celle de Billy Boy, quand il fait danser à Alex Singin in the rain dans la scène du matraquage et du viol du couple, l'esthétique me semble être, par le gouffre, la distance qu'elle présente avec la réalité de la violence, un renforcement considérable du propos ; quand intervient la scène finale de La horde sauvage, les corps déchiquetés par les balles dans des ralentis grisants, c'est précisément à l'issue du film, et elle est l'évidence de la lassitude des protagonistes….

Mais les personnages de Tarantino ne me semblent bâtis que pour se lancer dans d'improbables scènes de karaté. Kill Bill me semble tout aussi enquiquinant que Matrix, le prêchi-prêcha New Age en moins et quelques idées narquoises en plus…

Mais bon ! Je ne prétends pas avoir un discours raisonné sur le cinéma…


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De Arca1943, le 18 avril 2005 à 12:40
Note du film : 2/6

À condition expresse de ne pas avoir d'yeux que pour ça – combien de grands films n'ont pas reçu le moindre prix dans le plus petit festival ! – moi aussi, je crois à l'utilité de ces palmes, oursons et autres lauriers. Par exemple, vous savez comme j'aime les farces. Eh bien, en -405, Aristophane décroche le 1er prix du festival d'Athènes pour sa pièce Les Grenouilles. (Franche rigolade. J'aime particulièrement la scène où Bacchus, déguisé en centaure, vient cogner à la porte d'Hercule parce qu'il a besoin de lui pour descendre aux enfers). Eh bien, encore aujourd'hui, Les Grenouilles reste sa pièce la plus connue…


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