On s'étonne que Arca1943, grand spécialiste de l'ésthétisme italien, préfère Lucia Bose à cette belle Paprika. Moi, Belfagor, je conseille à Raymond Domenech de la glisser dans le stand italien avant un certain France-Italie. Car les footeux de la Squadra souhaiteront tapoter les deux ballons ronds qu'elle porte sur elle, jusqu'à disputer des prolongations.

Une jeune fille frivole et de condition modeste devient comtesse grâce à ses formes naturelles particulièrement généreuses.

Formes généreuses (la délicieuse Paprika possède deux ballons de football à un endroit bien précis de son anatomie), humour décapant (voire provocant), bavardages à tout va, esthétisme… Les qualités de ce long-métrage de Tinto Brass ne manquent pas. La galerie d'aristocrates dégénérés et de mères maquerelles vaut un détour à lui tout seul… On peut ajouter une excellente direction d'acteurs (l'actrice principale est fabuleuse de naturel), une science du récit et des cadrages impeccables. Mais ce film ne s'adresse, ni ne conviendra à tout le monde (c'est un euphémisme) et il accuse aussi quelques longueurs (sans jeu de mot) : les scènes exotiques n'étaient par exemple pas indispensables et n'apportent pas grand-chose au récit. Ce film a enfin (et heureusement) un sens (même s'il tarde un peu à se dessiner) : démystifier par l'image la réussite sociale dont peuvent se prévaloir certaines figures emblématiques de la société italienne. La forme est au service du fond, et c'est tant mieux.

Le monde de Brass est bien étrange, hors norme, ambigü (on pourra faire de lui un héraut de l'émancipation féminine, ou au contraire l'accuser d'exploiter l'image des femmes de façon sexiste). On peut toutefois lui reconnaître un statut de véritable auteur de cinéma (sans être un génie). Rien à voir avec un Russ Meyer dont l'oeuvre pulpeuse peut paraitre bien surfaite et superficielle.