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L'âme du guerrier


De Impétueux, le 8 mai 2009 à 23:48
Note du film : 4/6

Est-il si étrange que ça que Bertrand Tavernier ait consacré deux de ses films, et parmi les plus réussis, La vie et rien d'autre et Capitaine Conan aux années qui ont suivi la Première Guerre ? Lui-même fils d'un grand résistant, sans doute a-t-il tôt perçu ce que le massacre de 14-18, événement traumatique du siècle pour la France, portait en germe d'horreurs suivantes…

Est-il si étrange, aussi, qu'un film qui présente un personnage si ambigu que Conan, admirablement joué par Philippe Torreton ait pour cadre d'opération les lointains du conflit, l'Orient balkanique, si oublié et si extérieur, en apparence, aux buts immédiats des luttes, la défense du sol sacré du territoire ? On ne peut pas ne pas s'attacher à Conan, à son courage, à sa vitalité, à sa capacité à entraîner, à protéger ses hommes – jusqu'à l'absurdité -, à sa clairvoyance sur les tueries… et en même temps, et parallèlement, on ne peut pas ne pas s'effarer devant son aveuglement, sa furie meurtrière, sa violence, l'espèce de jouissance sacrée qu'il éprouve lorsqu'il plonge un poignard dans le ventre d'un ennemi…

Montherlant, qui a beaucoup réfléchi sur la guerre et le goût monstrueux, irraisonné et irrépressible que les hommes en ont, écrit quelque part La guerre fait jouer un rôle aux gens qui ne sont pas capables de s'en fabriquer un eux-mêmes. Et ce rôle, quoi qu'on dise, est et sera éternellement, de ceux qui leur relèvent la tête. Conan, petit mercier d'un coin perdu de Bretagne, le dit au début du film à son camarade Norbert (Samuel Le Bihan) : il est fait pour ça, conduire une troupe à l'assaut, préparer les pièges, les traquenards, monter les embuscades, mener les coups de main, se faire aimer d'une bande de loups dont il canalise le goût du sang. Il n'y a pas plus poignant que les dernières images où, alcoolique, vieilli, bouffi, il est retrouvé par Norbert à quelques mois de cette mort qu'il sait prochaine et qui sera bienvenue…

Il est tout de même dommage que Tavernier ait gardé les gros sabots qu'il affectionne pour un sujet si grave et si complexe : la veulerie des chefs, tous fantoches ridicules et odieux est trop habituelle pour ne pas lasser et le parti-pris de montrer les aspects grotesques de la guerre (l'épidémie de dysenterie, la comptabilité sans fin des formulaires d'intendance) est filmé sans trop de finesse ; je pense aussi qu'on pourrait chipoter sur quelques détails para-historiques (qu'est-ce que c'est que cette abondance de Médailles militaires sur les poitrines des officiers ? Seul Conan devrait pouvoir la porter puisque les bataillons de chasseurs à pied, arme dont il est issu, l'ont reçue en janvier 18 ! Rappelons que la Médaille militaire n'est décernée qu'aux sous-officiers et aux généraux ayant commandé en chef. Et puis de Scève (Bernard Le Coq), officier de carrière, ne devrait pas, vu son âge évident, n'être que lieutenant !

Torreton est parfait et les scènes de combat, qui ont bénéficié d'importants moyens sont saisissantes ; le reste de la distribution est moins homogène, à l'exception du rôle secondaire de l'aumônier, Claude Brosset, que j'ai trouvé excellent…

Un disque de suppléments offre notamment une intervention tout à fait claire et remarquablement intéressante de Stéphane Audoin-Rouzeau, directeur de l'Historial de la Grande Guerre de Péronne, qui situe fort bien la chronologie et la particularité du théâtre d'opération.


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Critique


De PM Jarriq, le 15 novembre 2004 à 09:29

Quand je dis "inexistante", je veux dire que tous les films de Tavernier me donnent la sensation d'être inachevés. Les choix de réalisation, d'objectifs, laissent un peu l'impression d'un "making of". L'abus de Steadycam (qui semble anachronique dans des films d'époque comme "Capitaine Conan") fait que tout semble traité au même niveau, que les scènes fortes ne surnagent pas vraiment par rapport au reste. C'est bien sûr un sentiment personnel, mais aucun film de Tavernier ne m'a totalement satisfait et je pense à mon préféré "Coup de torchon" dont les mouvements de caméra incessants et inutiles me filent le tournis au lieu de me faire entrer dans le film.


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De Arca1943, le 15 novembre 2004 à 00:31

Étrangement peut-être, je ne suis pas du tout d'accord. Je n'aime pas tous les Tavernier, loin de là – par exemple Des enfants gâtés m'ennuie et La Passion béatrice est un ratage. Mais pour moi Que la fête commence, Le Juge et l'assassin et surtout La Vie et rien d'autre sont de grands films, que j'ai revus souvent. Comment ça, "mise en scène inexistante"? Pourrais-tu être plus explicite?


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