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Avis sur Bienvenue à Gattaca


De Jérôme MORROW, le 27 avril 2007 à 15:22

Bonjour,

J'ai trouvé ce site sur lequel on pouvait réagir sur ce somptueux film. Pour ma part, je l'ai découvert il y a longtemps (en 2000) et pas par hasard : c'est le professeur de SVT qui m'a permis de le découvrir à l'époque où j'étudiais la génétique. J'en suis tombé raide dingue à tel point que je l'ai regardé des dizaines de fois et l'ai fait partagé à tous mes amis.

Andrew Niccol est talentueux (on a pu le voir avec Truman ou Lord of War). Un film SF que l'on peut même qualifier de film d'actualité.

Ce qui m'a laissé sans voix, c'est la simplicité du film (utilisation de la voix off), le tut accompagné d'une musique superbe !! Ceux qui ont des connaissances en génétique auront beaucoup apprécié le super jargon qui s'y référe comme "il n'y pas de gène pour le destin" "pirate génétique" " dé-gène-éré !" " on a réussi à faire de la discrimination une science " " bien sur, la discrimination est illégale, on apelle ça du génoisme "

Andrew a su réalisé un film super avec un thème très récurrent dans la société d'aujourd'hui, et pas sûr que ce soit vraiment un film de SF !!! on aurait aimé qu'il réalise plus de film.

Note : 10 / 10


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De Gaulhenrix, le 31 mars 2007 à 16:35
Note du film : 6/6

Eh bien, Mathilde, je partage ton coup de foudre… mais un peu tard pour échanger nos impressions ! J'ai vu ce film par le plus grand des hasards chez des amis qui s'apprêtaient à en visionner le Dvd. Je dois dire qu'il m'a fait forte impression. Et je me propose d'expliquer ci-après quelques-unes des raisons qui me l'ont fait apprécier comme l'un des tout meilleurs de science-fiction de ces dernières années.

Il faut noter, d'abord, qu'il n'utilise que fort peu les codes visuels du genre : les trucages, les objets et les décors futuristes, voire extravagants, n'ont pas cours. Bien au contraire, la force du film est de nous proposer un univers et un cadre, à la fois familiers et décalés, faits de bâtiments fonctionnels, de longs couloirs, d'immenses espaces impersonnels, d'êtres anonymes, canalisées, surveillés, contrôlés, qui se croisent, silencieux et indifférents, exécutants dociles de quelque tache sociale. Et cette distorsion crée un étrange climat propre à nous plonger dans un monde dépaysant qui ressemble au nôtre mais dont les règles nous sont insolites, voire incompréhensibles.

Les personnages qui habitent ce monde futuriste ajoutent à notre malaise par leurs regards inexpressifs, leurs visages impassibles, comme vides de toute émotion, leurs attitudes toujours retenues et la tonalité récurrente de tristesse qui imprègne le film. Une froideur que renforce la lumière sans éclat qui baigne le film et une photographie qui offre ses couleurs brunes et dessaturées succèdant au bleu métallique du générique. Bref, à Gattaca, la chaleur des sentiments et des couleurs qui est à la source de la vie s'en est allée, éliminée par une déshumanisation qui accentue la solitude de personnages réduits à leurs seules fonctions utilitaires. Nul sourire, nul éclat, mais une terne et triste réalité qui définissent un univers oppressant.

Le propos de Andrew Niccol transparaît ainsi à travers chaque séquence : cette société régie par une Science dévoyée – la Génétique – se fonde sur une mise aux normes dont l'efficacité tient à l'effacement de notre humanité. Une mise aux normes qui a pour corollaires, d'une part, la discrimination envers les non-conformes (physiquement et intellectuellement) et, d'autre part, la suspicion généralisée à l'encontre des supposés déviants.

Par ailleurs, la musique de Michael Nyman est l'élément majeur qui contribue à donner au film son pouvoir de séduction, notamment à travers le thème principal – véritable leitmotiv -, illustration même de sa signification. D'abord simple fil conducteur de jeux de violons dont l'intensité, modulée en flux et reflux, traduit la mélancolie du doute et de l'hésitation, le thème prend de l'ampleur, se renforce d'un accompagnement plus rythmé, culmine en aigus et finit par scander une sorte de marche pleine d'une assurance sereine et d'une noblesse qui exprime la foi en la certitude que chaque être humain est unique et précieux et que chacun porte en soi la liberté de réaliser ses rêves. Un thème musical d'une grande force évocatrice qui trouve sa parfaite transcription visuelle lors de la séquence finale du départ de la fusée : certes, Vincent a atteint le but qu'il s'était fixé, mais, au-delà de son destin individuel, c'est bel et bien l'imperfection humaine qui se trouve ainsi célébrée, dans cette croyance que l'avenir de l'humanité doit conjuguer froide rigueur scientifique et sensibilité humaine pour éviter toute dérive totalitaire. La verticalité du décollage de l'engin spatial – concomitant au sacrifice par le feu de Jérôme -, dans un flamboiement inespéré de couleurs, enfin chaudes, qui illuminent ce monde aseptisé et malade de Gattaca, s'il consacre le rêve de Vincent, évoque tout autant les prémices d'une re-naissance encore possible : l'envol de Vincent empêchera peut-être la disparition de l'humanité…

Car c'est bien du destin de l'humanité dont il est question dans le film, comme le suggère, grâce à la poésie de ses images, Andrew Niccol par le rappel du souvenir de la victoire de Vincent sur Anton qu'il sauve de la noyade. Alors que les deux frères sont à demi immergés sous les vagues nocturnes d'un océan primitif, le regard de Vincent s'élève vers la nuit étoilée : ce mouvement de caméra, qui se situe peu avant la fin du film, retrace l'émouvant chemin suivi par l'humanité depuis l'océan, ce berceau originel de la vie, jusqu'à l'espace étoilé, dont l'exploration apportera peut-être les réponses qu'elle attend à ses questions. Cette séquence en ellipse poétique renvoie, en une sorte d'hommage à Kubrick, à celle de 2001 : l'Odyssée de l'espace lorsque l'outil lancé par l'hominidien vers le ciel se métamorphose, par la magie du cinéma, en fusée interstellaire.

Les deux citations en exergue du film (« Regarde l'œuvre de Dieu : qui pourra donc redresser ce qu'il a courbé ? » Ecclésiaste 7-13 / « Oui, nous toucherons à Dame Nature car c'est ce qu'elle veut. » Willard Gaylm) dont la seconde répond à la première sont sans ambiguïté et précisent le sens du film, qui est aussi celui de l'entreprise humaine dans sa quête prométhéenne de connaissance et de pouvoir. La Nature, dans le film, se réduit d'ailleurs pour l'essentiel aux « éléments » primordiaux : l' océan nocturne et hostile, lieu du défi entre les deux frères, et le ciel étoilé lointain et indifférent, promesse d'un objectif à atteindre. Loin de la Mère Nature accueillante des Romantiques, l'Univers sensible de Gattaca n'est plus qu'un territoire à conquérir. Ou, si l'on en croit la dernière phrase prononcée par Vincent à bord de la fusée traversant l'espace (« On dit que chaque atome de notre corps a fait partie d'une étoile. Peut-être que je ne pars pas. Peut-être que je rentre chez moi. »), un retour vers les origines du mystère et du sens de l'univers…

Questionnement sur la Société et l'avenir de l'Humanité, Bienvenue à Gattaca est, enfin, une évocation – en forme de célébration – à la fois sensible et douloureuse, de la fratrie et de l'individu. Vincent et Anton, Anton et Vincent ou les deux visages de l'humanité qui ressuscitent les personnages originels d' Abel et de Caïn et leur rivalité éternelle, réceptacle de tous les conflits entre les hommes. A moins que, métaphore de notre déchirement intérieur, ils ne soient les deux versants de notre personnalité en butte à la dialectique permanente de nos forces et de nos faiblesses. Les figures récurrentes sur lesquelles est construit le film  – « figures de l'opposition » (dominant / dominé), « de l'inversion » (Vincent dominant, puis dominé / Vincent dominé, puis dominant) et « de la substitution-inversion » (Vincent usurpe l'identité de Jérôme / Jérôme se fait passer pour Vincent) -, étroitement liées aux thèmes de la rivalité et de la revanche, insistent d'ailleurs assez sur une lutte biologique qui ne cesse jamais. Que ce soit « entre » les individus, ou « contre » l'Univers…

Bref, un film à « découvrir » pour ceux qui ne le connaissent pas encore !


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