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Une perle unique


De Impétueux, le 6 mars 2015 à 17:58
Note du film : 6/6

Le propre des grands films est qu'on ne se lasse pas de les voir et revoir, goûtant un peu mieux chaque fois la maîtrise du réalisateur et la qualité de son récit. Un grand bonheur aussi est de vibrer comme si on ne connaissait pas sur le bout du doigt les péripéties des Yeux sans visage et on se laisser aller à emprunter les fausses pistes tendues par Georges Franju dans ce film bref (1h25), tendu, concentré.

Pierre Brasseur, qui a souvent la tentation de jouer un peu trop fort, si je puis écrire, défaut fréquent des gens de théâtre, est là absolument parfait, grave, obstiné, ravagé à la fois par l'accident de sa fille qu'il a défigurée et par le parti qu'il a pris de lui redonner un visage. Son personnage est aussi complexe qu'il le fallait, dans une histoire qui, si elle fait évidemment songer aux scènes horrifiques du Grand Guignol a tout de même aussi pas mal de complexité intelligente. Alida Valli a exactement le beau visage inquiétant qui sied au rôle de la maîtresse complice de Brasseur/Génissier, vouée à lui parce que, sans qu'on en sache davantage, il a pu lui donner une figure (mais prélevée comment ? sur qui ?).

Et la silhouette fragile, élégante, gracieuse d'Édith Scob est également parfaite pour donner de la consistance à Christiane Génissier, dont le personnage, tout aussi complexe que ceux de son père et de sa compagne, est peut-être le plus intéressant.

Certes, Christiane achève le cycle infernal de recherche de nouvelles proies en tuant Louise/Alida Valli et en libérant les chiens tenus enfermés par son père pour ses expériences et rendus fous par la claustration qui vont déchiqueter le professeur Génissier. Mais, si elle est horrifiée par les morts criminelles des victimes, elle accepte tout de même assez aisément leur sort et n'aurait rien trop à dire si la greffe réussissait. Est-ce que ce n'est pas davantage par lassitude d'être le cobaye des tentatives désespérées de son père qu'elle met fin à tout et s'enfonce dans la nuit, entourée de colombes, dans une séquence d'une grande beauté onirique ?

Beaucoup d'images du film, d'ailleurs, sont aussi superbes qu'angoissantes, en premier lieu la course initiale de la 2CV dans la nuit, dont j'ai déjà parlé dans un précédent message : les arbres y paraissent surexposés, presque comme sur négatif photographique, hostiles et obsédants. Mais aussi la haute demeure à la façade austère, ses couloirs secrets et ses pièces arrogantes, la salle d'opération glacée qui fait tant contraste avec le boudoir où vit la jeune fille au visage dévasté…

Je gage que si un réalisateur avait aujourd'hui l'absurde idée de tourner un remake des Yeux sans visage, il ne mégoterait pas sur les scènes gore, désormais si aisées à présenter à un public habitué aux pires épouvantes. Le film de Georges Franju n'est pas dénué d'horreurs, ce qui n'était pas si commun en 1960 : visage calciné de Christiane, entraperçu par Edna (Juliette Mayniel), à demi consciente, décollage chirurgical de l’épiderme d'Edna, corps de Génissier ensanglanté… Mais tout le film baigne dans une atmosphère d'angoisse et d'incertitude qui en fait une réussite parfaite, solidement étayée par la musique de Maurice Jarre (qui n'a donc pas travaillé que pour les grandes machines d'Hollywood) et par une bande-son impressionnante (les hurlements infernaux des chiens encagés).

Une réussite parfaite, un film qui fait vraiment peur.


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De Tamatoa, le 7 septembre 2014 à 03:09
Note du film : 6/6

Revoyant pour la énième fois, l'autre jour, les admirables Yeux sans visage de Georges Franju, je m'émerveillais encore qu'on pût créer, dans la séquence initiale, un tel climat de malaise et d'angoisse par le simple cheminement, sur une route isolée, dans la nuit, d'une 2CV ; la façon de filmer l'obscurité, les arbres menaçants, l'eau noire, le visage inquiétant d'Alida Valli, la musique …tout est prenant…. (Impétueux)

Moi aussi je viens de revoir pour la énième fois cette merveille. Tout a été dit. Mais je reviens sur ce film pour parler d'une étrangeté d'autant plus étrange qu'elle traine dans l'oeuvre d'un metteur en scène des plus méticuleux. Je veux parler des voitures qui circulent dans ce film. Et en particulier de la DS de Pierre Brasseur. Il arrive près du cimetière en DS 20 Pallas avec phares longue portée et bande latérale de protection, il en repart avec une ID 19, sans phares longue portée ni barre latérale de protection. Quand il se gare devant son garage, la voiture possède bien sûr une immatriculation. Le temps qu'il descende pour ouvrir la porte du garage, l'immatriculation a changé… Puis nous retrouverons plus tard la DS avec ses phares longue portée, etc, etc. Bien sûr, cela n'enlève strictement rien à la qualité de ce film majeur dans l’œuvre de Franju. Mais il est quand même curieux que personne dans l'équipe du tournage n'ait relevé ces détails. Et je suppose que la personne chargée du montage a dû se mordre les doigts… Ce genre d'anecdote prouve une chose : c'est que le film n'a pas été tourné dans l'ordre chronologique des scènes, ce qui est très courant dans le cinéma. On peut supposer qu'il a fallu rendre la première DS à la location à la date prévue et qu'elle n'était plus disponible pour tourner le retour au garage. Et une troisième pour son entrée dans le garage. Trois voitures différentes pour une séquence de trente cinq secondes… Et ce n'est qu'un détail à gérer parmi des milliers d'autres pendant un tournage. J'imagine la galère pour tourner le jour le plus long ou Week-end à Zuydcoote..

Et dans le film, c'est aussi flagrant que sur ces photos… Mais dans ce domaine, le pompon revient quand même à Bernard Blier dans Faut pas prendre les enfants du bon Dieu pour des canards sauvages, un tout autre genre, qui passe sans souci, dans différents plans d'une même séquence, de la Simca 1300, à la Simca 1301. Tous les types de ma génération vous diront l'énorme différence entre les deux modèles…


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Les prémices de la greffe du visage


De Romuald, le 14 avril 2009 à 00:29

A part Arca, personne n'a répondu à ma question….Dites voir, je suis très indiscret ou très bête ?

                                         pour \Lagardère

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De Romuald, le 11 avril 2009 à 20:18

Sérieux ? Vous envisagez de vous lancer un jour ? Pour ma part, ça restera un joli rêve mais j'aurais bien aimé qu'un Christian-Jaque ou un Jean dreville (folie des grandeurs ! ) s'en empare….

                                    pour \Lagardère

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