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Trop mièvre pour être réussi


De Impétueux, le 27 août 2007 à 18:55
Note du film : 2/6

À ce moment-là, Yves Allégret et son complice, le scénariste Jacques Sigurd venaient de tourner Dédée d'Anvers, Une si jolie petite plage, Manèges et Les miracles n'ont lieu qu'une fois, films de désespoir craquant, de destins amochés, de vies gâchées, de noirceurs, de duplicités, films cruels et poignants qui correspondent très bien aux difficultés d'un pays qui, après l'enthousiasme de la Libération, se découvre affaibli, ruiné, ravalé aux querelles politiques habituelles et où le ravitaillement est encore médiocre et les restrictions réelles.

Nez de cuir était pourtant un sujet en or, le roman de Jean de La Varende alliant puissance, cynisme et désespérance avec une bien belle histoire, celle de Roger de Tainchebraye, nobliau normand, aimé des femmes, grand séducteur, défiguré dans une charge de cavalerie lors de la bataille de France en 1814.

Je pensais que la patte acérée, cruelle même qu'avait Allégret permettrait de faire mesurer cette sorte de folie ravageuse qui s'est emparée de Tainchebraye après le drame, qui le pousse à saccager les ménages, à séduire les femmes les plus honnêtes, à profaner même les amitiés….et, naturellement à se laisser prendre un jour au piège.

Je n'ai pas reconnu dans le film cette cruauté triste ; sans doute tout n'y est pas mauvais, et les débuts sont même excellents, avec ce dévouement formidable des piqueurs et serviteurs qui vont ramasser leur maître sur le champ de bataille, et le ramènent pieusement dans sa contrée, dans son château, disant S'il doit mourir, il mourra chez nous !. Les soins, donnés par un médecin (Massimo Girotti) lui-même émasculé dans une des boucheries napoléoniennes, les premières sorties du beau garçon défiguré et contraint, donc, de porter un curieux masque de cuir, les jalousies narquoises des anciens (et futurs) cocus se moquant de l'estropié sont bien venus. (Tout comme est enfin rappelée la folie des guerres de l'Empire, leur sauvagerie sans répit).

Mais ensuite, ça patouille et languit. Tainchebraye, dix ans après, a troussé à peu près tout ce qui porte jupon dans la province, et sa soif de frais minois est, par définition, inextinguible. A l'occasion du retour un peu précipité d'un mari survient l'os, qui s'appelle Judith de Rieusses et qui a les beaux yeux de Françoise Christophe. Et tout ira de mal en pis.

Pourquoi Yves Allégret a-t-il raté ce film, qui était tout écrit, tout fait, dans la lignée de ses réussites précédentes ? Je gagerais volontiers que la pire des mauvaises idées est le choix de Jean Marais pour assurer le rôle-titre. Trop ricanant, comme d'habitude, engageant déjà la lourde carrière d'acrobate qui lui vaudra ses grands succès de Bossu et de Capitan dans la décennie suivante, Marais porte de lourds sabots là où il aurait fallu le justaucorps élégant d'un Stewart Granger, celui de Moonfleet et de Scaramouche.

Le film se traîne donc, à peine enluminé par l'excellente présence du vieux mari de Judith, (Jean Debucour), par une trop brève séquence de chasse à courre (mais belle comme tout) et par une séquence finale, à la Trappe, bien filmée et d'une grande noblesse.

Mais ce n'est pas suffisant. Dommage. Un remake ne serait pas absurde à réaliser…


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